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LOT 51

Emmanuel CHABRIER. 5 L.A.S. « Emmanuel » ou...

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Emmanuel CHABRIER. 5 L.A.S. « Emmanuel » ou « Emml », [mai-septembre 1891], à sa femme ; 14 pages in-8 et 2 pages in-4, une lettre au crayon, une enveloppe.
Sur sa situation financière et ses enfants, et Lohengrin à l’Opéra.
[La Membrolle] 3 mai, sur la banqueroute de son banquier Jouanno : « Où allons-nous, ma pauvre femme ? C’est la ruine, ma petite chérie ! – Que vais-je faire ? je ne puis pas rester dans cette situation-là ; c’est la déveine sur toute la ligne. […] il faut que nous changions de vie ou que je trouve un équivalent – mais quoi ? quoi faire ? Nous ne sommes pas heureux, maman »... –Tours 6 juillet, sur l’examen d’André pour l’entrée au Prytanée de La Flèche : « Ce matin, nous sommes partis, le petit Loulouloup et le gros Papipopoussof, sur le coup de 6 h. 1/2, dans une roulante à Barateau, après avoir lampé un bouillon gras, un pain-fromage et une verrée de vin ». André passe seul son examen à la Préfecture, « sous la surveillance d’un assez jeune capitaine » : thème latin et version latine, dictée et analyse logique : « « il s’est foutu dedans pour des subjonctifs […] Enfin, l’ensemble ne m’a pas paru trop mal et le capit[ain]e m’a dit que c’était convenable. Quant à l’analyse logique il y a là tant de mots dissonnants que ça m’a rappelé un peu Le Rêve que j’aime beaucoup pourtant ; je n’y comprenais rien, le cap[itain]e non plus, je crois, mais il voulait avoir l’air ; enfin, à la grâce de Dieu, qui devrait bien un peu penser à nous ici-bas, à moins qu’il n’ait, à notre endroit, des vues superbes dans l’avenir. Espérons & attendons, mais pas de charbon, pas de revolver, pas de noyade en chœur, aimons-nous. De 4 à 5, le jeune fœtus fait son th[ème] et sa version allemande »… – La Membrolle] 13 juillet. « Et d’abord, de la prudence demain. Si vous avez placé le drapeau français sur le balcon, assurez-vous-bien qu’il est solidement fixé à la grille ; si ça allait dégringoler dans la rue, ça nous ferait des affaires d’état. – Ne bougez pas de la maison, – voir quoi ? des foules ? Ce n’est pas drôle, et ce sont ces jours-là qu’un tas de salops cherchent à pénétrer dans les appartements »… Longues explications sur les démarches à faire et les gens à solliciter pour obtenir l’admission d’André au Prytanée de La Flèche… Puis sur son jeune neveu Fernand Jacmart : « Ta mère reçoit Fernand comme si c’était Guillaume II ; les quartiers de viande paraissent et disparaissent, on ne les voit qu’une fois à table ; si elle n’était pas sourde comme un pot, je lui dirais que je ne comprends rien à ces dépenses exagérées, Fernand est simplement Fernand et si heureuse qu’elle puisse être de recevoir son petit-fils, je trouve que c’est de l’exagération »… – [La Membrolle] 18 juillet. Il s’irrite contre son fils André : « si tu te figures qu’il pense à toi ou à moi ! Il ne pense à rien, il ne communique jamais rien ; il peut avoir, si l’on insiste, un petit accès de sensibilité nerveuse, mais ça passe très vite : il n’aime rien, et rien ne vient jamais de là, par la réflexion et le désir d’aimer ; ce cerveau est vide. Enfin, maman, voici la situation : 1° s’échiner, faire des kilos de platitudes pour tâcher de pousser des enfants absolument en retard ; 2° cette salle affaire J[ouanno] qui me tourmentera jusqu’à ce que ce soit fini ; 3° pas assez d’argent ; 4° mon travail se débattant au milieu de toutes ces préoccupations ; 5° éloigné de toi trop souvent ; 6° et malade, car je sens que j’ai un tas de choses qui couvent et éclateront un jour ou l’autre. – Tout ça est si triste et quand tu es là, je suis moins malheureux »... – [Paris] 18 septembre. Il a eu à temps son fauteuil : « à 7 h. juste j’arrivais devant le théâtre. Il y avait déjà des manifestants, des sergents de ville et des badauds. La salle était faite d’avance et le contrôle était très sévère. Enfin Lamoureux se glisse en tapinois, donne 3 coups secs sur son pupitre et commence. La représentation a été superbe »… Courses diverses ; dîner à Chatou chez les Chevillard avec les Lamoureux… Consultation à la clinique du Dr Maurel : « il a été épaté, disant que ça allait remarquablement mieux ! Tu penses si je suis content ! Il en a profité pour corser le régime et je le reverrai d’ici à 3 semaines ou un mois, – quand le nouveau régime aura opéré. […] à 6 h. je serai chez Lamoureux pour dîner et nous irons tous les 3 à Lohengrin. J’ai idée que ce sera chaud ce soir. […] Samedi je déjeune chez Wilder et dîne chez Van Dyck – à 4 h. j’apprends à maman Costallat la Bourrée fantasque ! Dimanche – je sors Marcel »…
On joint une L.A.S. à son fils André, Nice [fin février 1892].
Ancienne collection Francis Poulenc.

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Time, Location
06 Feb 2020
France, Paris
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Emmanuel CHABRIER. 5 L.A.S. « Emmanuel » ou « Emml », [mai-septembre 1891], à sa femme ; 14 pages in-8 et 2 pages in-4, une lettre au crayon, une enveloppe.
Sur sa situation financière et ses enfants, et Lohengrin à l’Opéra.
[La Membrolle] 3 mai, sur la banqueroute de son banquier Jouanno : « Où allons-nous, ma pauvre femme ? C’est la ruine, ma petite chérie ! – Que vais-je faire ? je ne puis pas rester dans cette situation-là ; c’est la déveine sur toute la ligne. […] il faut que nous changions de vie ou que je trouve un équivalent – mais quoi ? quoi faire ? Nous ne sommes pas heureux, maman »... –Tours 6 juillet, sur l’examen d’André pour l’entrée au Prytanée de La Flèche : « Ce matin, nous sommes partis, le petit Loulouloup et le gros Papipopoussof, sur le coup de 6 h. 1/2, dans une roulante à Barateau, après avoir lampé un bouillon gras, un pain-fromage et une verrée de vin ». André passe seul son examen à la Préfecture, « sous la surveillance d’un assez jeune capitaine » : thème latin et version latine, dictée et analyse logique : « « il s’est foutu dedans pour des subjonctifs […] Enfin, l’ensemble ne m’a pas paru trop mal et le capit[ain]e m’a dit que c’était convenable. Quant à l’analyse logique il y a là tant de mots dissonnants que ça m’a rappelé un peu Le Rêve que j’aime beaucoup pourtant ; je n’y comprenais rien, le cap[itain]e non plus, je crois, mais il voulait avoir l’air ; enfin, à la grâce de Dieu, qui devrait bien un peu penser à nous ici-bas, à moins qu’il n’ait, à notre endroit, des vues superbes dans l’avenir. Espérons & attendons, mais pas de charbon, pas de revolver, pas de noyade en chœur, aimons-nous. De 4 à 5, le jeune fœtus fait son th[ème] et sa version allemande »… – La Membrolle] 13 juillet. « Et d’abord, de la prudence demain. Si vous avez placé le drapeau français sur le balcon, assurez-vous-bien qu’il est solidement fixé à la grille ; si ça allait dégringoler dans la rue, ça nous ferait des affaires d’état. – Ne bougez pas de la maison, – voir quoi ? des foules ? Ce n’est pas drôle, et ce sont ces jours-là qu’un tas de salops cherchent à pénétrer dans les appartements »… Longues explications sur les démarches à faire et les gens à solliciter pour obtenir l’admission d’André au Prytanée de La Flèche… Puis sur son jeune neveu Fernand Jacmart : « Ta mère reçoit Fernand comme si c’était Guillaume II ; les quartiers de viande paraissent et disparaissent, on ne les voit qu’une fois à table ; si elle n’était pas sourde comme un pot, je lui dirais que je ne comprends rien à ces dépenses exagérées, Fernand est simplement Fernand et si heureuse qu’elle puisse être de recevoir son petit-fils, je trouve que c’est de l’exagération »… – [La Membrolle] 18 juillet. Il s’irrite contre son fils André : « si tu te figures qu’il pense à toi ou à moi ! Il ne pense à rien, il ne communique jamais rien ; il peut avoir, si l’on insiste, un petit accès de sensibilité nerveuse, mais ça passe très vite : il n’aime rien, et rien ne vient jamais de là, par la réflexion et le désir d’aimer ; ce cerveau est vide. Enfin, maman, voici la situation : 1° s’échiner, faire des kilos de platitudes pour tâcher de pousser des enfants absolument en retard ; 2° cette salle affaire J[ouanno] qui me tourmentera jusqu’à ce que ce soit fini ; 3° pas assez d’argent ; 4° mon travail se débattant au milieu de toutes ces préoccupations ; 5° éloigné de toi trop souvent ; 6° et malade, car je sens que j’ai un tas de choses qui couvent et éclateront un jour ou l’autre. – Tout ça est si triste et quand tu es là, je suis moins malheureux »... – [Paris] 18 septembre. Il a eu à temps son fauteuil : « à 7 h. juste j’arrivais devant le théâtre. Il y avait déjà des manifestants, des sergents de ville et des badauds. La salle était faite d’avance et le contrôle était très sévère. Enfin Lamoureux se glisse en tapinois, donne 3 coups secs sur son pupitre et commence. La représentation a été superbe »… Courses diverses ; dîner à Chatou chez les Chevillard avec les Lamoureux… Consultation à la clinique du Dr Maurel : « il a été épaté, disant que ça allait remarquablement mieux ! Tu penses si je suis content ! Il en a profité pour corser le régime et je le reverrai d’ici à 3 semaines ou un mois, – quand le nouveau régime aura opéré. […] à 6 h. je serai chez Lamoureux pour dîner et nous irons tous les 3 à Lohengrin. J’ai idée que ce sera chaud ce soir. […] Samedi je déjeune chez Wilder et dîne chez Van Dyck – à 4 h. j’apprends à maman Costallat la Bourrée fantasque ! Dimanche – je sors Marcel »…
On joint une L.A.S. à son fils André, Nice [fin février 1892].
Ancienne collection Francis Poulenc.

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