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Bonaventure LAURENS (1801 1890) dessinateur et mus…

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Bonaventure LAURENS (1801-1890) dessinateur et musicien. L.A.S. avec musique et dessins, Montpellier 21 décembre 1838, à Félix Danjou à Paris ; 7 pages et demie in-4, adresse (petite déchirure par bris de cachet).

Belle et longue lettre musicale. Félix Danjou (1812-1866), compositeur et musicologue, organiste à Saint-Eustache, était un des rédacteurs de la Revue et Gazette musicale de Paris.
Danjou va recevoir ses articles du Courrier du Midi ; il comprend que la Gazette ne puisse reproduire ses lignes contre La Juive d’Halévy, les éditeurs dictent les opinions du journal, comme on le voit par les procédés « dégoûtans » à l’encontre de Simon Richault : « on n’annonce plus aucune des intéressantes publications de cet éditeur et on cherche même à les décréditer en publiant des articles tendant à prouver que les œuvres de Schubert éditées par Richault ne sont pas de Schubert »… Ayant apprécié les articles de Danjou sur l’orgue de Fribourg, il se rappelle celui qu’il vit jadis à Avignon, construit par un nommé Piantanida, « homme presque fou à force d’originalité mais plein de talent. Outre la pureté des sons de son orgue, les changemens de jeux s’opéraient par un mécanisme très ingénieux. La voix humaine était un tuyau à bouche. Si ma mémoire ne me trompe, Piantanida m’avait dit que cette voix humaine n’était qu’un Prestant accordé un peu plus haut que le prestant ordinaire. Quoi qu’il en soit, le son en était saisissant »… Castil-Blaze pourrait lui raconter encore de « le dada de Piantanida » : une eau miraculeuse pour la voix humaine et les tuyaux d’orgue… Il lui donne avec humour « des renseignemens secrets sur l’état de l’art musical à Montpellier », parlant du doyen des organistes, M. Agar, au jeu dur et aux improvisations insignifiantes ; Sebastiani Bouchet, prêtre espagnol réfugié qui s’inspire d’Auber et de Rossini : « il chante les litanies sur un mouvement de walse. Il est assez souvent bien nul et bien trivial » ; Guiraud, « organiste universel » dont il croque le portrait à la mine de plomb et cite quelques mesures d’orgue, avec une partie de pédalier grotesque… Certains professeurs de piano ne manquent pas de talent d’exécution, notamment Mlle Rodolphe, qui étudia sous Kalbrenner, et M. Victor Roger, qui étudia « un peu » au Conservatoire, mais le « commun de leurs confrères est tout ce qu’il y a de plus indigne de l’art divin qu’ils cultivent », et dépourvu d’éducation musicale, littéraire et scientifique… Il éreinte ensuite les artistes dramatiques : « Canaille, canaille, trois fois canaille sans talens », à l’exception de Mme Lemoule, cantatrice dont le mérite est « d’ennoblir tout ce qu’elle dit et de ne jamais gâter par les lieux communs de la fioriture, les belles phrases des rôles »… Mais il n’y a pas de réunions musicales, les quatuors d’Onslow sont rarement exécutés, ceux de Haydn, Mozart « et même Beethoven sont traités de Rococo et voués à un éternel oubli »… Il parle avec dédain des amateurs, et du peu de succès que lui-même eut avec les sonates de Bach pour piano et violon, et complète « cette espèce de statistique musicale de Montpellier » par un portrait de Paulin Bonnefous, ancien élève du Conservatoire, aujourd’hui rentier, « le plus assommant parleur et la plus grande canule qu’il y ait au monde »… Il le prie d’acquérir pour lui la Biographie musicale de Fétis, promet de lui envoyer des vues de Lodève et d’Arles qu’il fait graver, et pour satisfaire son goût de la calligraphie, clôt sa missive par huit signatures différentes, et un dessin calligraphique à la plume…

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10 Dec 2018
France, Paris
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Bonaventure LAURENS (1801-1890) dessinateur et musicien. L.A.S. avec musique et dessins, Montpellier 21 décembre 1838, à Félix Danjou à Paris ; 7 pages et demie in-4, adresse (petite déchirure par bris de cachet).

Belle et longue lettre musicale. Félix Danjou (1812-1866), compositeur et musicologue, organiste à Saint-Eustache, était un des rédacteurs de la Revue et Gazette musicale de Paris.
Danjou va recevoir ses articles du Courrier du Midi ; il comprend que la Gazette ne puisse reproduire ses lignes contre La Juive d’Halévy, les éditeurs dictent les opinions du journal, comme on le voit par les procédés « dégoûtans » à l’encontre de Simon Richault : « on n’annonce plus aucune des intéressantes publications de cet éditeur et on cherche même à les décréditer en publiant des articles tendant à prouver que les œuvres de Schubert éditées par Richault ne sont pas de Schubert »… Ayant apprécié les articles de Danjou sur l’orgue de Fribourg, il se rappelle celui qu’il vit jadis à Avignon, construit par un nommé Piantanida, « homme presque fou à force d’originalité mais plein de talent. Outre la pureté des sons de son orgue, les changemens de jeux s’opéraient par un mécanisme très ingénieux. La voix humaine était un tuyau à bouche. Si ma mémoire ne me trompe, Piantanida m’avait dit que cette voix humaine n’était qu’un Prestant accordé un peu plus haut que le prestant ordinaire. Quoi qu’il en soit, le son en était saisissant »… Castil-Blaze pourrait lui raconter encore de « le dada de Piantanida » : une eau miraculeuse pour la voix humaine et les tuyaux d’orgue… Il lui donne avec humour « des renseignemens secrets sur l’état de l’art musical à Montpellier », parlant du doyen des organistes, M. Agar, au jeu dur et aux improvisations insignifiantes ; Sebastiani Bouchet, prêtre espagnol réfugié qui s’inspire d’Auber et de Rossini : « il chante les litanies sur un mouvement de walse. Il est assez souvent bien nul et bien trivial » ; Guiraud, « organiste universel » dont il croque le portrait à la mine de plomb et cite quelques mesures d’orgue, avec une partie de pédalier grotesque… Certains professeurs de piano ne manquent pas de talent d’exécution, notamment Mlle Rodolphe, qui étudia sous Kalbrenner, et M. Victor Roger, qui étudia « un peu » au Conservatoire, mais le « commun de leurs confrères est tout ce qu’il y a de plus indigne de l’art divin qu’ils cultivent », et dépourvu d’éducation musicale, littéraire et scientifique… Il éreinte ensuite les artistes dramatiques : « Canaille, canaille, trois fois canaille sans talens », à l’exception de Mme Lemoule, cantatrice dont le mérite est « d’ennoblir tout ce qu’elle dit et de ne jamais gâter par les lieux communs de la fioriture, les belles phrases des rôles »… Mais il n’y a pas de réunions musicales, les quatuors d’Onslow sont rarement exécutés, ceux de Haydn, Mozart « et même Beethoven sont traités de Rococo et voués à un éternel oubli »… Il parle avec dédain des amateurs, et du peu de succès que lui-même eut avec les sonates de Bach pour piano et violon, et complète « cette espèce de statistique musicale de Montpellier » par un portrait de Paulin Bonnefous, ancien élève du Conservatoire, aujourd’hui rentier, « le plus assommant parleur et la plus grande canule qu’il y ait au monde »… Il le prie d’acquérir pour lui la Biographie musicale de Fétis, promet de lui envoyer des vues de Lodève et d’Arles qu’il fait graver, et pour satisfaire son goût de la calligraphie, clôt sa missive par huit signatures différentes, et un dessin calligraphique à la plume…

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